Le Pommeau est un produit relativement nouveau qui, s’il était quelquefois réalisé autrefois de façon empirique en campagne, n’a été réellement mis au point que dans les années 1980 à 1990 alors que l’on doit au Normand Chort-Muller d’en avoir énoncé les bases quelques années plus tôt. Généralement consommé à l’apéritif, il est le résultat du mélange d’un jus de pommes à cidre non fermenté avec une une eau de vie de cidre d’au moins deux ans d’âge et titre au final entre 16 et 18°*.
Un concours des meilleurs Pommeaux de France est organisé tous les ans dans le cadre du salon de l’Agriculture. Il comprend 2 catégories (lorsque c’est possible) pour chacune des régions de production, le Maine, la Normandie et la Bretagne. Ces trois pommeaux ont chacun leurs caractéristiques propres car suivant les aires de production, les variétés de pommes à cidre utilisées pour son élaboration varient.
En Cornouaille, sa mise au point a été l’occasion de nombreuses recherches sur les variétés les plus adaptées à son élaboration. Si le principe est le même qu’ailleurs, il doit être affiné 14 mois minimum en fut de chêne avant sa mise en marché et les variétés de pommes entrant dans sa composition doivent être choisies parmi celles sélectionnées pour l’élaboration du cidre d’Appellation AOP Cornouaille. Il existe aujourd’hui une distinction officielle entre le Pommeau de Bretagne et le Pommeau de Bretagne “Cornouaille”.
Le moins que l’on puisse dire c’est que les résultas du Concours des Pommeaux de Bretagne au CGA 2013 consacre cette distinction. Les 4 médailles attribuées ont toutes été décernées à des ateliers de cidrerie cornouaillais.
Pommeau de Bretagne AOC de 2 ans
Médaille d’Argent : Cidrerie Melenig – Elliant
Pommeau de Bretagne AOC de 3 ans et plus
Médaille d’Or : Cidre Sehedic – La Foret Fouesnant
Médaille d’Argent : Distillerie des Menhirs – Plomelin
Médaille d’Argent : Cidrerie Menez Brug – Fouesnant
Pourquoi ce résultat.
Sans prétendre à une quelconque autorité en matière de Pommeau, un certain nombre d’éléments peuvent à mon sens expliquer ce résultat.
Tout d’abord, il y a évidemment la personnalité des membres du jury (dont la composition est heureusement confidentielle) qui par hasard peuvent certaines années préférer les Pommeaux de type Cornouaille.
Ce n’est pas suffisant loin s’en faut et je pencherais plus pour l’impression que m’ont laissées les dégustations aux quelles j’ai eu le plaisir de participer (et les quelquefois où j’ai réussi à en faire goûter à des sommeliers qui ne voulaient plus en entendre parler). Une remarque revient de façon quasi systématique chez de nombreux dégustateurs : “Ce Pommeau manque de caractère”. Il est très souvent perçu comme un produit sucré acidulé montrant peu de puissance en bouche et encore moins de longueur. S’il y a bien entendu des exceptions à cette perception en Normandie, dans le Maine et en Bretagne, le Pommeau de Cornouaille échappe lui presque toujours à ce jugement.
Un peu de c’hwerv** et tout va mieux.
Il y a une raison très simple. Le Pommeau des Cornouaillais est comme leur cidre, on y trouve toujours un peu de c’hwerv et cela change tout. Comme le font si bien remarquer les gastronomes, l’amertume ouvre la porte à des expérience gustatives impossibles sans sa présence.
Il ne faut pas chercher plus loin. Si les Cornouaillais travaillent bien, ils n’ont pas le monopole du bel ouvrage. Par contre ils ont longtemps chercher à sélectionner les meilleures variétés de pomme à cidre pour obtenir bon Pommeau. Ce travail leur a coûté du temps et probablement quelques parts de marché car d’autres ont été plus rapides.
Aujourd’hui ils récoltent les fruits de leur patience et le Pommeau de Bretagne “Cornouaille” s’impose chaque jour un peu plus comme la référence d’un produit encore en devenir.
Kroas Avaloù – 7 a viz ebrel 2013
* Arabat evañ re, fall eo evit ar yerc’hed (l’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération).
** C’hwerv : (amertume) prononcé féo à Fouesnant et dans le sud Cornouaille