Nous n’étions pas nombreux en ce 17 janvier 2017. Il faisait très froid, enfin pour nous pauvres Cornouaillais habitués aux douceurs hivernales. À l’intérieur du Sistrot par contre il faisait bon et la clientèle, assez fournie pour un mardi soir de grand froid, se délectait de cidres et de plats mitonnés avec passion.
Pour autant point n’est besoin d’être très nombreux pour prendre plaisir a découvrir des cidres du monde car c’est bien là l’objet de ces rencontres, dans ce fameux bistrot à cidre des quais de l’Odet à Quimper.
Les forces en présence.
À la table de dégustation Brieug Saliou et sa compagne Marine de l’excellente Cidrerie des Vergers de Kermao à Gouesnac’h, Ronan Gire du Sistrot, éminent spécialiste du cidre de tradition, et moi-même. Autant dire que malgré notre petit nombre la dégustation promettait d’être sérieuse.
Nous avions prévu de tester quatre cidres, tous originaires de contrées fort éloignées de la Bretagne, mais nos bavardages chronophages nous ont finalement décidé à nous contenter des deux les plus extrêmes. Nous avions donc à notre disposition un Bear Swamp Orchards “New England style” produit par Steve Gougeon & Jen Williams à Ashfield dans le Massachusetts (USA) et un cidre “rosé” des Palhàs produit par Caroline Leroy à Sainte Anastasie, dans le Cantal (FRA).
Ces deux produits ont étonnamment un point commun, puisque tous les deux font appel au raisin dans leur process d’élaboration. Cependant l’un titre 12% vol et est présenté comme un style de cidre ayant survécu alors que sévissait la prohibition aux USA, tandis que l’autre est élaboré à partir de pommes du verger conservatoire local et se réfère au style traditionnel du Pays de Massiac (15) qui fait passer le cidre sur le marc de raisin.
Le Hard Cider “New England style” de Bear Swamp Orchard.
Nous sommes toujours démunis, en nos contrées, quand se présente un cidre avec une capsule, mais avantage du lieu, Ronan a toujours un “distouver” (tire-bouchon et limonadier) sur lui. De plus, le “New England style” est un cidre tranquille (il ne pétille pas) comme il s’en produit aux USA et au Canada, par contre son jus est additionné de sucre roux et aromatisé au raisin.
Le débouchage n’a évidemment produit aucun son.
Dans la bouteille il avait une couleur sympathique et dans le verre c’est encore mieux.
Au nez, nous avons noté de la pomme bien sûr, mais le raisin se fait bien sentir. Il est relativement puissant avec un petit coté champignon et un aspect réduit qui le rapproche un peu de celui du cidre de glace (pour ce que nous en connaissons bien entendu).
En bouche, c’est bien un cidre de la Nouvelle-Angleterre, acidulé comme il se doit. L’alcool est très présent et lui confère une certaine structure qui le fait autant ressembler à un vin qu’à un cidre. Pour autant il manque un peu de largeur à notre sens.
La fin bouche est assez courte ce qui est normal avec ce type de produit.
Pour être honnête, nous ne sommes pas enthousiastes pour des cidres à si fort taux d’alcool car le faible taux d’alcool de nos cidres est un argument efficace. Nous sommes étonnés qu’un tel produit puisse avoir survécu en pleine prohibition car l’alcool est franchement présent. Pour autant, c’est une découverte intéressante, en particulier pour Brieug et Marine car il se situe aux antipodes de leur propre production.
Le cidre “rosé” des Palhàs de Caroline Leroy.
Celui-ci avait un bouchon dûment tenu par un muselet. Il s’est ouvert comme il faut avec joli bruit sympathique.
La couleur à vrai dire ne nous a pas paru très rose, plutôt à mi-chemin entre le rose et l’orangé, quelqu’un a dit que faisait “saumon”. Tout comme le précédent, il est un peu duveteux, ni totalement limpide, ni trouble. Cela provient évidemment de la méthode d’élaboration au plus proche des traditions.
L’effervescence est standard avec un effet de mousse sans exagération et une animation du verre relativement tenace.
Le nez est peu puissant, mais en “cherchant” dans le verre, nous lui avons trouvé de petites effluves fermentaires qui parasite le fruit, la pomme, assez présente, et le raisin, assez discret.
En bouche c’est sec et acidulé. Cela dépend bien entendu du moment de consommation, mais il est dommage de ne pas proposer une structure en bouche plus établie qui permettrait d’en apprécier plus longtemps les saveur au palais.
La fin de bouche est un peu astringente, ce qui correspond tout à fait à ce type de cidre.
Globalement, et même si nous nous attendions à un produit sec et acidulé, nous sommes resté sur notre soif car l’étiquette promettait plus en terme de parfums et d’apports fruités du marc de raisin.
En guise de Conclusion
Nous nous sommes arrêté là, gardant nos autres trouvailles pour une assemblée plus fournie, en février prochain. Notre petite tablée salue le travail de Steve Gougeon, Jen Williams et Caroline Leroy. Leurs produits ont une vraie place sur la petite planète du cidre. À n’en pas douter le temps fera son œuvre et à force de travail ces produits deviendront des références d’une tradition qu’il est indispensable de prolonger. Grâce à eux, grâce à tous les passionnés d’un produit vrai, le cidre ne tombera pas dans l’uniformité.
Pour clore ce petit compte rendu, mersi bras (merci grand) à Ronan Gire du Sistrot qui tout en assurant le service au bar et en salle, a trouvé le temps de venir donner son avis et commenter les cidres de la soirée.
Mark Gleonec