Ces petites réunions ont longtemps été impossibles à organiser en raison de la pandémie du Covid 19 et de ses prolongement sanitaires et liberticides. Les restaurants ayant eu l’autorisation d’ouvrir, le Sistrot s’est plié aux règles de distanciation et de gestes barrières pour proposer à nouveau ses cidres et sa cuisine inspirée aux gourmets de Cornouaille et d’ailleurs. Il faut croire que ce petit événement fut vécu comme une libération par notre équipe car ce fut belle affluence au point que l’on se demanda si nos échantillons suffiraient pour une si belle tablée. Ce fut juste, mais suffisant et tous les participants ont pu voyager confortablement du Nord de l’Italie à l’État de New-York en passant par le Pays Basque et bien sur la Bretagne. Outre les habituels producteurs, nous avions l’honneur d’accueillir Sylvain Le Cras, producteur de vins de miel à Concarneau et Martin Rohée, caviste à la Vie de Château à Quimper, tous deux échappés de leur monde respectif pour venir découvrir des cidres du monde que les dégustations du Sistrot savent débusquer.
Hoops, Cidrerie du Golfe, Morbihan, 5,5% vol.
Un cidre infusé au houblon qui nous vient d’Arradon Commune de la côte Nord du golfe du Morbihan dont l’extrémité Est donne sur le goulet à l’entrée de Vannes. Au service l’effervescence mesurée, se calme sur une robe jaune à peine voilée. Le nez est comme souvent avec ce type de cidre totalement occupé par le houblon sans pour autant trop annoncer une bière. En bouche, la pomme reprend ses droits acidulés et secs et laisse une finale plutôt courte avec une pointe d’astringence affirmée. Un bon cidre sans artifice, aromatisé et dans l’air du temps.
Sarasin, Kystin, Vannes, 4% vol.
Un cidre macéré au blé noir torréfié, qui doit être une première tout en s’inscrivant dans les expérimentations de la Maison Kystin. Au service l’effervescence assez timide laisse découvrir une robe orange et limpide. Le nez est au contraire expressif avec des senteurs pralinées de fruits secs torréfiés, de notes de chocolat et de tabac. La bouche est douce et un peu lourde avec une présence pralinée un peu déroutante qui laisse au final un sillage court. Si l’expérience est intéressante, elle gagnerait sans doute laisser plus de place à la pomme.
Classicum 2017, Maley, Brissogne (Val d’Aoste), 8% vol.
Il s’agit d’une expérimentation menée afin de tester l’intérêt de l’incorporation de gentiane. Le service, comme attendu de la part le la Maison Maley est impeccable avec un bel effet de mousse, une robe claire et limpide et de fines bulles. Le nez est surprenant avec la puissance de la gentiane qui laisse peu de place à la pomme. La bouche acidulée tangue un peu sur des notes de réglisse et une finale un peu asséchante aux saveurs de pamplemousse. Au final l’essai est cependant intéressant, mais gagnerait à moins doser la gentiane.
Quitten, Floribunda, Salorno (Sud-Tyrol), 6% vol.
La Maison Floribunda (du nom des rosiers obtenus par croisement d’hybrides de Thé et des Rosiers Polyantha), s’affiche avec l’étiquetage bilingue Italien-Allemand, commun au Sud Tyrol. Producteur de pommes bio dès les années 1980, elle produit du cidre depuis le début des années 2000. Le Quitten est un cidre au coing au beau service, bel effet de mousse, robe pâle et jolies petites bulles. Le nez est très aromatique avec de la fleur et du fruit et de petites notes fumées. La bouche est douce et acidulée et douce, mais manque un peu de la puissance aromatique annoncée par le nez. La fin de bouche est assez courte. L’ensemble est agréable, mais cela gagnerait à être plus structuré car le nez est vraiment superbe.
Extra-Terroirestrial, Angry Orchard (New-York), 7,6% vol.
Produit par le département cidre artisanal de la puissante compagnie Angry Orchard, c’est un hard cider américain où les pommes anglaises se taillent la part du lion. 31% Yarlington-mill, 31% Dabinett, 15% Northern-spy, 15% Goldrush et 8% d’un mélange de Cox-Orange, Golden-Russet et McIntosh. Le service est discret avec une robe pâle juste perlante et un léger voilé. Au nez il y a ces arômes typiques des pommes anglaises, concurrencées cependant par celui des brettanomyces ce qui peut plaire mais également déplaire. La bouche est vineuse et à l’aveugle cela ferait penser à un vin blanc léger. Au final cependant l’Extra-Terroirestrial, laisse une bonne impression.
Alma Cider, Docendo-Discitur, Villeneuve (Val d’Aoste), 9% vol.
Un extra-brut du Val-d’Aoste où le cidre retrouve des couleurs après une absence de plus d’un demi-siècle. La bouteille bien présentée s’ouvre sur un service impeccable avec un bel effet de mousse, une robe claire et limpide et de fines bulles. Dans le verre cela fait penser à un champagne. Au nez également avec de petites notes fermentaires et de belles fragrances florales. La bouche équilibrée, acidulée sans excès, fait un peu penser à un Crémant de Loire avec une pointe de clou de girofle et une petite amertume en fin de bouche. L’ensemble est agréable, mais peut-être un peu éloigné de l’univers du cidre.
Extra-brut, Coat-Albret, Bédée, Pays de Rennes, 6% vol.
Cela faisait un moment que nous nous étions promis de tester ce cidre dont la réputation s’établit avec constance dans le nord-est de la Bretagne. La bouteille, très sobre, s’ouvre avec une belle présentation Sur un cidre orange pâle très joli dans le verre. Le nez, fruité, est très fin avec de belles petites notes d‘amandes et de fleurs blanches. En bouche c’est comme attendu, sec, fruité avec un peu d’acidité. La finale est longue et fruité. Un très bon et très homogène cidre breton qui fait honneur à son terroir.
Sagarnoa, Txopinondo, Ascain, Pays Basque, 6% vol.
Txopinondo est une maison tenue par le plus Basque des Bretons, ou le plus Breton des Basques, cela dépend si vous êtes de l’un ou l’autre de ces peuples. Ce n’est pas exactement du cidre, c’est du vin de pomme, tel qu’il se produit depuis des siècles au Pays Basque. Il faut secouer la bouteille avant de servir. Du coup de n’est aussi net que nos cidres modernes, mais la présentation en souffre peu. Au nez il y a des parfums de pommes et les effluves un peu piquées et vinaigrées qui font le caractères de ces cidres. En bouche il y a la puissance et cette permanence de l’acidité qui laisse cependant un sillage assez plaisant. Nous avions déjà testé des cidres basques, bien plus affirmés qui n’avaient pas enchantés nos dégustateurs, mais celui ci fut une bonne surprise.
Comme nous l’indiquions en préambule, cela faisait longtemps que nous n’avions pas pu tenir de genre de dégustation. Ce fut un très bon moment à la fois concentré, sérieux, mais aussi joyeux et détendu et qui s’est prolongé tard avec une exploration gourmande de la nouvelle carte du Sistrot.
Merci à Erwan et Ronan Gire nos hôtes qui nous avaient réservé la salle “intra-muros” au fond du restaurant, merci Erwan Le Loupp de la Cidrerie de Ponterec, à Marine et Brieug Saliou de la cidrerie des Vergers de Kermao, à Isabelle Richard de la ferme cidricole Les Bouteilles à l’Amère, à Paul Coïc de la cidrerie Paul Coïc, à Valérie Simard, l’animatrice du Cidref, à Delphine Lemoine, la stagiaire du Cidref qui faisait là son premier exercice pratique de dégustatrice, à Gwenael Thomas des Cidres Le Brun, à Alexandre Stephan de la cidrerie La Maison de Perguet, à Sylvain Le Cras de l’Hydromelerie de Concarneau et à Martin Rohée, de La Vie de Château à Quimper.