Cette variété n’est ni en voie d’extinction, ni trop affectée par le changement climatique. C’est une pomme appréciée dont il faut cependant vérifier le pH(1). Réputée originaire du Pays Fouenantais, ses fruits sont souvent ronds, de calibre moyen et se présentent en sorte de grappes le long des branches, ce qui est assez sympathique.
Les arbres sont rustiques, plutôt vigoureux et érigés. La productivité est bonne, mais assez marquée par l’alternance. La floraison intervient début mai et les fruits arrivent à maturité tardivement, au plus tôt à partir de la mi-octobre.
C’est une variété douce-amère, comme généralement en Pays Fouenantais. Le rendement sous la presse est dans la bonne moyenne, la densité est bonne, le jus est coloré, sucré, avec des saveurs et une pointe d’acidité agréables. Quelques cidriers l’utilisent d’ailleurs, en assemblage, dans leur jus de pomme. Elle participe également à l’élaboration d’excellents cidres. Son jus est réputé permettre une belle clarification, ainsi que le notait déjà en fin de XIXe siècle J.F. Crochetelle, qui la classait parmi les meilleures variétés du cru local.
Son nom est intéressant car il peut être compris comme une description immédiate du fruit ou comme un reflet de libertinages bucoliques, heureux ou contrariés.
Littéralement, cela donne Rous (roux) koumoul (nuage) bihan (petit), ce qui correspond bien au fruit qui est petit, vaguement roux (quoique tirant vers le doré) avec des nuances de couleurs pouvant faire penser à des nuages.
Il existe toutefois un autre sens plus ancien de Koumoul dont on trouve trace dans un manuscrit de Dom Louis Le Pelletier (1663-1733). Le mot serait utilisé pour sombre ce qui donnerait Rousse-sombre-petite, parfois conforme à l’aspect de la pomme, mais pourrait rappeler une contrariété liée à la variété, ou à son fruit.
En effet le mot s’écrivait Koumoulenn anciennement et quelques fois comme assez récemment sur le plan initial du Verger Conservatoire de Penfoulig à Fouenant. Si le sens premier du mot est toujours nuage, il peut désigner une jolie fille, un sens que l’on retrouve chez Youenn Drezenn dans son Intron Varia Garmez, mais également une préoccupation, un nuage dans la pensée et donc quelque chose de moins gai. Serait-ce alors le souvenir du ressentiment d’un galant éconduit ?
Il faut se garder d’interprétation hâtive, mais en tout cas la Rous-koumoul-bihan(2) une bien jolie pomme.
1 – Le pH (potentiel Hydrogène) est un indicateur d’acidité des moûts dont la valeur influe sur les réactions biochimiques lors de la fermentation. Un pH bas prolonge le temps d’inoculation de la bactérie Zymomonas Mobilis, responsable du Framboisé, et augmente le rôle protecteur du SO2. La Framboisé rend le cidre impropre à la consommation.
2 – Il existe une Rous-koumoul-bras (Roux-nuage-grand), une pomme à deux fins (consommation et jus) parfois utilisée en cidrerie et assez proche en apparence de la Rous-koumoul-bihan. Ce genre de pomme n’est pas isolée, la tradition cornouaillaise ne disposait pas de variétés acidulées, mais avait recours en cas de besoin, à ces pommes rustiques et paysannes tenues pour variétés à deux fins et dont les noms sont quasi-exclusivement en Breton. Cela les différenciait des pommes à croquer bourgeoises des Manoirs et Châteaux aux noms quasi-exclusivement en Français.
© Mark Gleonec (textes & photos).