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C’hwerv-gwenn

C'hwerv gwenn
C’hwerv-gwenn, le mot c’hwerv (amer) se prononce χwεrw en Breton académique (le « c’h » se prononce à peu près comme la Jota espagnole), il se dit cependant féo ou féro en Sud Cornouaille.

Ce n’est cas un cas isolé, les pommes, à cidre ou à croquer, voyagent et bien souvent leur nom change, surtout si les langues d’usage des paysans-cidriers diffèrent. La C’hwerv-gwenn l’illustre bien et nous offre en prime de consulter d’anciennes descriptions montrant un fruit finalement assez stable dans le temps (au gré des variantes, clones et mutations cependant). Très présente dans tout le Sud-Cornouaille, son origine est inconnue, mais il est acquis qu’il s’agit d’une variante de la Blanc-Mollet, une variété à cidre très courante sur de nombreux terroirs cidricoles de l’Hexagone depuis plusieurs siècles. Bien que réputée d’origine inconnue, son nom Blanc-Mollet est peut-être en rapport avec Claude Mollet (1557/1647), éminent architecte-jardinier et auteur du Théâtre des plans et jardinages, ouvrage précurseur de l’aménagement du jardin d’agrément.

Les arbres manquent généralement d’un peu de vigueur, ils sont érigés et assez étalés avec un houppier anarchique et peu dense. Ils sont assez résistants, y compris à la tavelure. Leur bonne productivité est toutefois altérée par une alternance marquée. Les fruits, plutôt petits mais parfois moyens, sont semi-hâtifs (parfois hâtifs). Ils restent accrochés à leur branche tant qu’il n’y a pas trop de vent et se conservent plutôt bien au sol. Le jus coloré, sucré et peu amer, permet d’élaborer, si les fruits sont à la bonne maturité, un bon cidre mono variétal, mais ils sont en général utilisés en assemblage.

D’excellente réputation, la C’hwerv-gwenn est attestée de longue date en Pays Fouenantais où cohabitent plusieurs variantes assez proches. À contrario, en Pays Bigouden, on peut trouver des C’hwerv-gwenn-Peurid, C’hwerv-gwenn-Gwenac’h et une variété assimilée, la Per-skav, qui sont sensiblement différentes, alors qu’en Vallée de l’Aulne et à Braspart la C’hwerv-gwenn-ar-Faou semble plus proche.

C’hwerv-gwenn-Gwenac’h et Per-skav

Son nom signifie littéralement “amer-blanc” que l’on pourrait également considérer comme “amer-sage” car le mot “gwenn” prend le sens de “sage” ou de “sagesse” quand il est utilisé dans un nom. On peut cependant penser que ce nom est simplement inspiré par le nom en Francais (sans le deuxième terme Mollet) car la pomme est bien de couleur blanche ou du moins très pâle. Le “c’hwerv” s’imposait car l’amertume est parfois assez prononcée et peut difficilement être qualifiée de sage.

Mesurer la densité du jus, une obsession de cidrier.

Caractéristiques : Les valeurs ci-dessous sont des moyennes obtenues à partir de relevés étalés sur un siècle, avec des échantillons provenants de vergers très différents. Ces chiffres ne sont donc pas très précis, les conditions d’analyse a largement variées. Ils montrent cependant une relative homogénéité.

Rendement en jus sous le pressoir 60 %. Densité : 1060. Acidité totale : 1,45 g/l d’acide sulfurique.. Amertume (polyphénols totaux) 2,70 g/l d’acide tannique. Période de floraison : Hâtive. Période de maturité de brassage : Hâtive (suivant les variantes). Type cidricole : Douce-amère.

On trouvera dans Pommier à Cidre, J.M. Boré & J. Fleckinger, 2002 (p. 146-148), dans Du pommier au cidre, C. Jolicœur, 2016 (P. 73-74) ou Pommes et cidre en Cornouaille, Mark Gleonec, 2019 (p. 48-40), des notes récentes sur La C’hwerv-gwenn et la Blanc-Mollet.

À la page 424 de son Traité des Fruits tant Indigènes qu’Exotiques (1839), Jean François Couverchel écrit ; “Pomme blanc-mollet, douce, amère; bonne espèce, très productive; cidre bon qui se conserve longtemps, pays d’Auge, Eure.–Douce Morelle d’Aumale, Grande Vallée, Gournay pays de Caux, Roumois, Oise.”

Ci-dessous les pages 447 et 448 de Le cidre, (1875) de L. de Boutteville & A. Hauchecorne.

Ci-dessous les pages 4, 5 et 6 de l’Atlas des fruits à cidre, (1896) d’A. Truelle.

Ci-dessous l’article de Crochetelle Sur la c’hwerv-gwenn paru dans l’Union Agricole au début du XXe siècle (Avant la parution en librairie, il fit paraître son étude par article chaque vendredi dans ce journal).

À noter également que la Bibliothèque des Champs Libres à Rennes conserve les Archives des Vergers expérimentaux de l’École d’Agriculture des Troix-Croix de Rennes, dont une planche datant de la période 1882-1910, représente un Blanc-Mollet.